Après avoir baigné dans l’eau douce pendant presque 12 mois, il était temps pour Méléos de retrouver l’eau salée !
Après une bonne mise en main technique et un nettoyage de printemps, il est également temps pour nous de voir enfin son comportement marin. Ronan nous en a tellement parlé, on a hâte d’essayer!
Notre grand départ étant prévu de la Rochelle, il nous faut convoyer Méléos de Morlaix à la Rochelle. Le trajet prenant environ 3 jours, la décision est prise de le réaliser le week-end du 14 juillet afin de profiter d’un équipage complet pour se relayer.
L’équipage sera le suivant : Marine, Eric (le père de Marine), Ronan (l’ancien propriétaire de Méléos), Matthieu (ami navigateur Meignannais) et Laurent (ami tennisman Meignannais, pour qui ça sera un baptême sur l’eau et que nous déposerons à l’Aber Wrach) et moi-même.
La logistique du week-end est donc la suivante : Marine descend une voiture à la Rochelle et remonte en train le jeudi soir avec Eric (alias Papa) jusqu’à Morlaix. Sébastien part d’Angers et monte en train à Morlaix (arrive conjointe prévue à 23h). Ronan nous récupère à la gare et nous dépose au bateau, Matthieu et Laurent arrivent le vendredi matin vers 11h en voiture accompagnés de l’épouse et les filles de Laurent.
Ça, c’est la théorie, dans la pratique, SNCF « c’est possible », on a eu droit à un problème de passage à niveau, à un train bloqué dans un tunnel à Massy et à un blocage des voies par des agriculteurs bretons… Ce qui nous donne : arrivée de Marine et Eric à minuit et Sébastien, champion de la soirée, à 2h du matin. Ronan aura fait du sommeil fractionné pour me récupérer à la gare, merci à lui.
Bon 11h, tout le monde est là, on termine les préparatifs, on casse une croûte et nous voilà fin prêts pour l’écluse de 16h30…
- À l’écluse
- Laurent et Matthieu attendant l’écluse
- L’équipage au depart
Petit coup de blues pour Marine et moi, on va quitter Morlaix, pour de bon, et déjà cette part du projet aura été géniale ! Si un jour on en a l’occasion, on s’installera ici. Cette ville est magnifique, ses habitants accueillants, la région fabuleuse, on est conquis ! Un merci du fond du cœur à la famille Guivarch, acheter un voilier c’est déjà sympa, mais avoir la chance d’être accompagnés et soutenus dans notre projet par les anciens propriétaires, c’est juste magique !
L’écluse s’ouvre enfin, le chenal s’avance et nous en prenons plein les yeux. Quels paysages, quel pied ! (Je tairais l’épisode du sondeur récalcitrant qui nous vaut quelques inquiétudes, mais comme la marée monte encore, pas de soucis pour notre tirant d’eau) et enfin nous apercevons le château du Taureau ! Pour un peu, on se prendrait pour l’Epervier ! Et voilà, la pleine mer, nous y sommes !
- Laurent et Matthieu au Taureau
- Préparation de la grand-voile
Après une bonne heure et demi de moteur seul, nous décidons d’envoyer la grand-voile pour appuyer un peu le bateau. Le cap à faire nous oblige à être très serré au vent et à conserver le moteur. Nous enroulons au large l’île de Batz avant la nuit mais le vent tourne en même temps que nous et nous allons devoir continuer au moteur+grand-voile jusqu’à l’Aber Wrac’h. La mer n’est pas agréable avec une houle courte et des vagues hachées, le vent de secteur ouest commence à rentrer et met à mal l’estomac de l’équipage, Laurent et Marine en ferons les frais. Les autres font les marioles … Mais pas longtemps, car ça brasse quand même !
Le premier quart de nuit sera pour Eric et Moi, Laurent et Marine étant hors course, Matthieu et Ronan prendront le deuxième quart.
Début de nuit très sympa malgré les vagues avec une pleine lune, malheureusement, ça se gâte, les nuages et quelques grains arrivent. Nous connaissons mal ce terrain de jeu, Ronan nous avais dit que ça pouvait être sportif, il a été entendu… Nous poussons le quart avec Éric jusqu’en vue du phare et de l’île Vierge et allons réveiller nos équipiers pour l’entrée de nuit et à marée basse à l’Aber Wrac’h (je le concède, sans sondeur, il faut avoir confiance dans le gps de Maxsea, car les cailloux sont ici assez contondants !). Ce chenal d’entrée de nuit, c’est un bon baptême du feu, des bateaux au mouillage, des lumières de partout et enfin nous accostons à 2h15 ce samedi 12 juillet. Malgré le second souffle de Laurent en posant le pied à terre, le voyage aura été éprouvant pour lui (ça aurait été le moment pour lui coller une tôle au tennis, mais ça sera pour une prochaine fois !). Son carrosse est avancé, son épouse et sa fille le rejoignent et je crois comprendre qu’il préfèrera sa fin de nuit à la notre …
Pour nous, petit roupillon rapide et départ vers le Four à 5h du matin. J’ai peu dormi, mais j’ai tellement envie de ne rien manquer que je reprends le quart suivant avec Ronan et Matthieu, la marée est montée, la sortie de l’Aber Wrac’h est moins stressante que l’arrivée et le soleil commencé pointer son nez, génial. Mes deux marins se relaient pendant que je roupille dans le cockpit, toujours le vent dans le nez avec moteur et grand-voile.
- Marine
- Matthieu
- Marine à la barre
Le four arrive bien vite et dans le chenal, la brume commence à tomber. Nous devinons plus que voir Ouessant, le courant est avec nous pour cette descente et il nous faut faire vite car nous aurons à gérer la renverse au raz de sein. La mer s’est calmée d’un coup avec le vent mais tout autour de nous, des remous, des contres-courants… Mieux vaut ne pas traîner dans le coin un jour de mauvais temps, car déjà par beau temps, c’est impressionnant !
La descente se passe bien mais arrivés au raz de sein, nous voilà avec 5 nœuds de courant dans le nez (on entrevoit l’île de Sein à tribord) ! Pour passer, il nous faut plus de puissance, et après avoir relue les abaques du moteur, j’accepte de le faire marcher à 3000 tours pour franchir le raz. Ronan ne l’a jamais fait fonctionner aussi haut en régime, et je touche du bois pour ne pas avoir de pépin. Nous passons la Vieille sous moteur et nous sortons de ce raz pour enfin allonger la foulée direction la Rochelle, il est 14h30.
Vers 18h, nous obliquons notre route et nous déroulons le génois ! Il est temps d’arrêter le moteur pour le plus grand confort de tous ! Une chose est sûre, je suis enfin rassuré sur ce moteur, il n’a pas bronché pendant ces 26 heures de navigation.
Quel bonheur, sentir le vent, entendre le bruissement de l’eau sur la coque. Matthieu ayant toujours l’œil affuté repère une chasse et des plongeons de fous de Bassan, avec un peu de chance, il y aura des dauphins… Et Bingo ! Un groupe de 4 vient jouer dans l’étrave pour l’apéro ! Ils resteront un petit quart d’heure pour notre plus grand plaisir.
- Dauphins
- Méléos
- Le capt’ain
Une nouvelle nuit s’annonce et je laisse Matthieu, Eric et Marine (qui s’est fait une santé) prendre le premier quart, nous allons roupiller un coup avec Ronan afin d’assurer la fin de nuit.
Celle-ci commence à être musclée puisque nous aurons des pointes à 28 nœuds. On restera pourtant grand-voile haute avec 2 tours dans le génois. Quelques grains se succèdent et la nuit est sombre. Lorsque nous prenons le quart avec Ronan, nos équipiers ont allongé la foulée et nous avançons à 7/8 nœuds de moyenne, pas mal pour un bateau de 10 tonnes ! Nous contournons Belle-île et apercevons les phares des Poulains et Goulphar malgré la légère brume. Nous croisons quelques bateaux de pêche et quelques cargos. Celui du petit matin nous gratifie d’un coup de corne de brume ! Il est vrai qu’à trop le regarder, nous faisions route de collision. Nous passons donc sagement dans son arrière. Le vent faiblit et nous avons déroulé tout le génois! Nous avançons malgré tout toujours entre 7et 8 nœuds, une pointe réalisé à 9 nœuds et quelques.
Le temps reste couvert et gris et nous terminons pour le petit déjeuné le stock de bonnes crêpes que j’ai acheté dans une boulangerie de Morlaix, elles étaient divines. Nous passons devant Port-Joinville à 11h30 et déroulons à présent sur La Rochelle. En vue de Bourgenay, nous décidons de faire un peu d’exercice et envoyons le foc sur l’étai largable pour le tester, ça me rappelle des souvenirs (pas si vieux) de n°1, mais bon sang, ça ne fait pas le même poids tout ça ! Je pense que je réfléchirais à deux fois avant de le retirer pour le remplacer par le génois lorsque nous ne seront que 2 matelots à bord.
Et puis, tant qu’à faire, autant tester aussi le spi asymétrique, magnifique dans sa livrée grise et rose… Première constatation, c’est un spi « lourd » et pas très grand. Il n’a pas du être taillé pour le bateau car il est un peu court de guindant. Mais il tire et fait son effet. Nous devrons malheureusement le retirer et repasser sous génois pour reprendre notre route et mettre cap sur le pont de l’île de Ré.
Le problème dans tout ça, c’est que nous sommes allés plus vite que ma simulation, et qu’en arrivant à 22h30 au lieu de 2h du matin, nous sommes à pleine marée basse en gros coeff de marée et que sans sondeur, l’affaire est périlleuse. Je ne souhaite pas spécialement passer une marée à attendre, bateau sur le flanc dans le chenal, ça ferait mauvais genre… Nous validons donc une nuit au mouillage devant l’île de Ré et la plage de Sablanceaux. Au programme, ti punch et feu d’artifice du 14 juillet (même si nous sommes le 13 au soir), elle est pas belle la vie !
Petit réveil matinal et nous nous dirigeons vers les minimes qui sera le port d’attache de Méléos pendant 1 mois et demi.
Matthieu nous quitte bien vite pour prendre un train vers sa famille en vacances dans le bordelais. Après avoir récupéré notre voiture, nous repartons sur Nantes déposer Ronan à la gare. Un petit coup à boire, un gros coup de blues, ça nous fait drôle de l’abandonner ici. On se côtoie depuis septembre dernier, notre date de départ approche, on a encore mille choses à faire, la maison ne trouve pas acheteur, on est crevé, un peu tendu aussi… Une petite larme, une embrassade, je ne sais pas si c’est aussi dur pour Ronan que pour nous mais en tout cas, merci pour cette mise en main du bateau, c’est un beau bateau, nous en prendrons soin et vous serez toujours les bienvenus à bord !